Sharing is Caring #45
3 years ago
General
Bonjour, bonjour.
Me revoici, fidèle au poste, pour une nouvelle édition. Et vous, comment allez-vous ? Novembre a-t-il été clément avec vous ? Je ne vous cache pas qu’en ce qui me concerne, la grisaille automnale me convient très bien. Rien de tel que de se blottir dans une couette bien chaude quand le froid s’installe dehors. Bien sûr, novembre a beau être le mois du deuil, l’automne est loin d’être une saison morose. Pensez à toutes ces teintes flamboyantes dont se pare la nature alors qu’approche la fin d’année. Comme promis, c’est donc une sélection pleine de lumière et de couleurs que je vous ai préparée. J’espère qu’elle sera à votre goût et qu’elle contribuera ne serait-ce qu’un peu à égayer ce morne mois. Sur ce, passons sans plus attendre aux réjouissances. :p
- Koati (Rodrigo Péres-Castro)
https://www.youtube.com/watch?v=TQdF12fgjW4
Et pour commencer en beauté, voilà un film qui ne manquera pas de ravir vos pupilles. Dans la jungle de Xo, c’est Balam le jaguar qui fait la loi, préservant la paix de ce paradis tropical avec sagesse et bienveillance. Et ce n’est pas une mince affaire, surtout quand vous devez composer avec un garnement comme Nachi. Jeune coati orphelin que le fauve a pris sous son aile, le garçon peine à trouver sa place dans leur petit monde et n’en fait souvent qu’à sa tête. Il ne manque pourtant pas de bonne volonté. Mais quand vous êtes le seul représentant de votre espèce dans toute la forêt, c’est difficile de ne pas en avoir gros sur le coeur. En de telles circonstances, comment ne pas se poser de questions ? Malgré tout, la vie à Xo est plutôt tranquille, et il est clair que Nachi adore la forêt et ses habitants plus que tout. De terribles événements ne vont toutefois pas tarder à venir assombrir ce tableau idyllique. En effet, leur jungle bien-aimée semble être en proie à de bien étranges phénomènes depuis quelques temps, et les tremblements de terre se multiplient de façon alarmante dans la région. Des bouleversements qui n’ont bien sûr pas échappés à la perspicacité de Balam et de ses conseillers, mais face aux soubresauts de la nature, le vaillant félin et ses bras droits se retrouvent bien impuissants. C’est là que les choses vont s’envenimer. Au sens propre comme au figuré. En effet, alors que la forêt est ravagée par une nouvelle secousse, Balam périt en tentant de protéger la tribu. Un voile de désespoir s’abat ainsi sur Xo. Survient alors Zaina, une vipère aussi opportuniste que charismatique qui a toujours rêvé de prendre la place du jaguar à la tête de la communauté. Profitant du désarroi de ses compatriotes, et sans même leur laisser le temps de pleurer la disparition de leur noble protecteur, la voilà qui prend les commandes et entraîne la meute dans une marche forcée vers une soi-disant terre promise où ils pourront tous vivre à l’abri du danger, leur faisant miroiter monts et merveilles quand bien même elle sera vraisemblablement la seule à qui cet exode profitera. Évidemment, Nachi et les anciens lieutenants de Balam y voient clair dans son jeu, mais les belles paroles de Zaina suffisent hélas à séduire le reste de la horde et ils n’ont pas d’autre choix que de suivre le mouvement, refusant d’abandonner les leurs aux caprices de la vipère. Une perspective qui est loin de plaire au jeune coati. Mais alors qu’il doit choisir entre suivre les siens ou rester à Xo, le garçon apprend par Cocopa, le sorcier de la tribu, que s’il ne retrouve pas sa vraie famille avant trois jours, celle-ci périra. Plus le temps de tergiverser. Sur les conseils du devin, l’intrépide Nachi part ainsi en quête de l’Arbre de Vie et de la "bouche qui ne parle pas", seuls indices dont il dispose pour retrouver son clan et le sauver d’une fin certaine. C’est une double course contre la montre qui s’engage alors. Car si les jours de la famille de Nachi sont comptés, l’égocentrisme de Zaina risque également de mener les habitants de Xo à leur perte. Ce pourrait-il néanmoins que les paroles de Cocopa cachent une autre vérité ? Accompagné de son ami Pako, une grenouille de verre qui n’a manifestement pas la lumière à tous les étages mais dont le coeur est indéniablement à la bonne place (vous pouvez vérifier par vous-mêmes ; la peau de son thorax et de son abdomen est transparente :p ), notre héros poilu embarque ainsi pour un périple semé d’embûches mais ô combien haut en couleur. On ne va pas se mentir, sur le plan scénaristique, le film ne casse pas des briques. C’est le récit classique du jeune en quête d’identité qui part à la recherche de ses origines, bravant tous les périls pour faire l’apprentissage de l’amitié et découvrir que les réponses qu’il cherchait étaient en lui depuis le début. Rien de bien nouveau, même si l’aventure demeure plaisante et les personnages attachants (je ne doute pas que Pako en tapera sur les nerfs de plus d’un, mais en ce qui me concerne, je l’ai trouvé plutôt sympathique). Sur le plan visuel, en revanche, le film est un véritable festin. L’objectif avoué du réalisateur était de faire tomber le spectateur "amoureux" de la forêt tropicale latino-américaine, et à ce titre, je pense qu’on peut dire que le film est une réussite. La somptuosité avec laquelle Koati dépeint la richesse de cet écosystème est d’une splendeur et d’une luminosité à couper le souffle. D’autant que le film fait le pari d’une animation entièrement en 2D, cherchant à évoquer comme un sentiment d’indescriptible nostalgie. On notera quelques transitions un peu maladroites ici et là, mais dans l’ensemble, le résultat est assurément à la hauteur de ses ambitions. Personnellement, c’est le passage de l’Arbre de Vie que j’ai trouvé le plus époustouflant. Sans entrer dans les détails, la majesté du paysage m’a tout simplement subjugué... Pour le reste, vous l’aurez compris, le spectacle est au rendez-vous. Un vrai feu d’artifice. Le réalisateur et son équipe signent avec Koati une fable enchanteresse et chaleureuse devant laquelle vous ne manquerez pas de passer un bon moment. Vraiment, je ne peux que vous recommander de jeter un coup d’oeil au film. Je ne sais pas s’il fera date, mais il laisse en tout cas un souvenir d’une rare beauté...
- Operago (Rayna Buxton)
https://www.youtube.com/watch?v=JhW1LdCmJFo
Parce qu’on ne pouvait pas célébrer le mois des morts sans parler au moins une fois de spectres et de revenants. :p Brio et Drusilla sont deux chasseuses de fantômes aux caractères bien trempés. Sur leur mobylette, elles parcourent le monde en quête de sensations fortes et d’âmes tourmentées à renvoyer dans la tombe. Justement, alors que les deux baroudeuses sont de passage dans une petite ville perdue en pleine campagne, un chant sépulcral s’élève du théâtre abandonné qui se dresse sur la falaise surplombant la bourgade. Le charmant village est aussitôt submergé - dans tous les sens du terme - par une horde d’ectoplasmes visqueux. Soldats sans visages à la solde d’une diva d’outre-tombe qui en a manifestement assez de chanter pour des sièges vides, les voilà qui se mettent à enlever les habitants pour remplir la salle de concert qu’hante leur maîtresse, un auditoire que la cantatrice fantomatique a bien l’intention de régaler pour le reste de l’éternité... Heureusement, Brio et Drusilla sont là pour mettre un terme à ce sinistre récital. Et avec style, s’il vous plaît. Le court-métrage étant un projet d’études, l’animation et la mise en scène sont naturellement encore un peu maladroites, mais le résultat ne manque pas pour autant de panache. La pâleur spectrale de la palette employée par l’artiste contraste joliment avec l’explosion de couleurs que proposait Koati, et son coup de crayon, d’une extravagance rare, interpelle aussi sûrement qu’il envoûte. On sent que le réalisateur s’est amusé avec les formes et les textures. L’image a un petit côté "scrapbook", comme si on l’avait décorée avec des chutes de tissu et de papier peint, que je trouve tout à fait charmant. D’autant que le character design a de la personnalité à revendre. En fait, que ce soit au niveau de leur apparence ou de leurs caractères, Drusilla et Brio me font un peu penser à Perle et Améthyste (de Steven Universe, cela va sans dire). D’un côté, on a la grande perche un peu guindée dont le sérieux et les remontrances dissimulent une âme forte et protectrice ; de l’autre, la rebelle rondouillarde qui prend les choses avec philosophie et fait toujours preuve de bonne volonté en dépit d’une certaine maladresse. Pourtant, malgré leurs différences, on sent qu’elles n’hésiteraient pas à aller jusqu’au bout du monde l’une pour l’autre, et c’est bien ça qui compte. En tout cas, cette dynamique pétillante ne manque pas de conférer une certaine fraîcheur au récit. Porté par une écriture pleine de piquant et d’esprit... au sens propre comme au figuré, Operago est vraiment un court-métrage qui vous donne envie d’en voir plus. À quand la série ? :p
- "Welcome To The Internet" from Bo Burnham's INSIDE - Cover by Justine M. (Justine's Mic)
https://www.youtube.com/watch?v=IWMNS1v_4RA
J’imagine que le titre de la vidéo résume déjà assez bien les choses. Ce qui vous attend à l’autre bout du lien est donc une reprise de la chanson "Welcome To The Internet", une ballade satirique diaboliquement entraînante que le comédien Bo Burnham a interprétée pour la première fois en 2021 dans son film Inside, une sorte d’essai cinématographico-musical que l’artiste a produit en plein coeur de la pandémie depuis l’intimité solitaire de sa demeure. Là aussi, le titre du morceau annonce à lui tout seul la couleur. Imaginez un instant que vous n’ayez jamais visité Internet de votre vie. C’est votre première fois, et voilà qu’un exubérant personnage - que je serais tenté de surnommer le "Navigateur" (ou la Navigatrice, dans le cas du cover dont je vous ai donné le lien) - apparaît sur votre écran pour vous souhaiter la bienvenue. Tel un Monsieur Loyal numérique, cet étrange guide des espaces virtuels vous fait alors faire le tour du propriétaire, passant en revue tout ce que le "world wide web" a à offrir. De merveilles en dérives, vous voilà entraîné dans un tourbillon d’infinies possibilités, une farandole endiablée de contenu telle que vous n’en avez jamais vue auparavant. Bienvenue sur Internet, le pays de vos rêves les plus fous. Vous l’aurez compris, le morceau est une réflexion aussi drôle que pertinente sur la place que le Net a prise dans nos vies depuis le début des années 2000 et la façon dont le réseau nous a fait prisonniers de sa toile en nous offrant tout ce que l’on pouvait imaginé. Ce qui commence comme un numéro enjoué et accueillant se transforme peu à peu en torrent frénétique, tandis que le spectateur prend conscience de ce que c’est que d’avoir "le monde entier dans la main". Pour le meilleur comme pour le pire. Une cyber-descente aux enfers portée par le cynisme guilleret du Navigateur, incarnation parfaite de la démence et de la démesure de tout ce qu’Internet a mis à notre disposition. Pourtant, il y a aussi quelque chose d’émouvant et de sublime dans cette curieuse co-dépendance qui s’est nouée entre le spectateur et ce réseau tentaculaire. Dans un rare élan de sincérité, le Navigateur revient ainsi sur son histoire, de ses débuts hésitants jusqu’à l’ère du tout numérique. Comme de vieux amis, nous avons grandi ensemble, nous avons évolué au contact l’un de l’autre, nous nous sommes inspirés l'un l'autre. Au bout du compte, les mille et un visages d’Internet ne sont que le reflet de l’humanité, éternellement destinée à la fois à la folie et à la grandeur... Oui, bon, j’en fais peut-être un peu trop. Mais ce n’est pas ma faute si cette chanson réveille ma fibre philosophique. :p Pour le reste, je vous avouerai que je n’ai pas grand-chose à ajouter sur le cover lui-même, mais je souhaiterais néanmoins saluer la performance de la chanteuse. Elle a parfaitement réussi à capturer l’entrain carnavalesque de l’original. Je me souviens d’un commentaire qui faisait remarquer que sa prestation aurait tout à fait pu coller à la Reine du Cyberespace, de Deltarune, et très franchement, je trouve que la comparaison décrit assez bien la fougue délirante et irrévérencieuse qui se dégage du morceau. Sublimée par une interprétation picturale qui réussit à capturer l’esprit du titre de manière éclatante, voilà assurément une reprise qui n’a pas à rougir devant l’original. Vous aussi, vous vous laisserez bien tenter par un peu de tout et n’importe quoi ? :3
Voili-voilà, j’espère que ce petit bulletin aura contribué un tant soit peu à dissiper la morosité de novembre. Comme d’habitude, n’hésitez pas à me faire part de vos remarques en commentaires. ;) Et si vous n’avez toujours pas eu votre dose de couleurs, je vous recommande aussi le film Charlotte, qui est sorti récemment, une très belle fresque animée inspirée de l’oeuvre et du destin bouleversant de la peintre juive allemande Charlotte Salomon. Une vraie pépite. Pour le reste, c’est une nouvelle fin d’année qui se profile à l’horizon. En ce qui concerne le prochain numéro, je ne prévois pas quoi que ce soit de spécial pour l’occasion, mais j’essaierai tout de même de marquer le coup. D’ici là, portez-vous bien, et n’allez pas commettre d’imprudences. N’oubliez pas que le convive indésirable qui s’invite à nos tables depuis la fin de la dernière décennie court toujours. Alors protégez-vous, et protégez ceux qui vous sont chers, de sorte à n’avoir aucun regret lorsque viendra l’An Nouveau. Sur ce, je vous souhaite bonne continuation, et à bientôt pour une nouvelle édition. Bye-bye les p’tits loups. ^_^
Me revoici, fidèle au poste, pour une nouvelle édition. Et vous, comment allez-vous ? Novembre a-t-il été clément avec vous ? Je ne vous cache pas qu’en ce qui me concerne, la grisaille automnale me convient très bien. Rien de tel que de se blottir dans une couette bien chaude quand le froid s’installe dehors. Bien sûr, novembre a beau être le mois du deuil, l’automne est loin d’être une saison morose. Pensez à toutes ces teintes flamboyantes dont se pare la nature alors qu’approche la fin d’année. Comme promis, c’est donc une sélection pleine de lumière et de couleurs que je vous ai préparée. J’espère qu’elle sera à votre goût et qu’elle contribuera ne serait-ce qu’un peu à égayer ce morne mois. Sur ce, passons sans plus attendre aux réjouissances. :p
- Koati (Rodrigo Péres-Castro)
https://www.youtube.com/watch?v=TQdF12fgjW4
Et pour commencer en beauté, voilà un film qui ne manquera pas de ravir vos pupilles. Dans la jungle de Xo, c’est Balam le jaguar qui fait la loi, préservant la paix de ce paradis tropical avec sagesse et bienveillance. Et ce n’est pas une mince affaire, surtout quand vous devez composer avec un garnement comme Nachi. Jeune coati orphelin que le fauve a pris sous son aile, le garçon peine à trouver sa place dans leur petit monde et n’en fait souvent qu’à sa tête. Il ne manque pourtant pas de bonne volonté. Mais quand vous êtes le seul représentant de votre espèce dans toute la forêt, c’est difficile de ne pas en avoir gros sur le coeur. En de telles circonstances, comment ne pas se poser de questions ? Malgré tout, la vie à Xo est plutôt tranquille, et il est clair que Nachi adore la forêt et ses habitants plus que tout. De terribles événements ne vont toutefois pas tarder à venir assombrir ce tableau idyllique. En effet, leur jungle bien-aimée semble être en proie à de bien étranges phénomènes depuis quelques temps, et les tremblements de terre se multiplient de façon alarmante dans la région. Des bouleversements qui n’ont bien sûr pas échappés à la perspicacité de Balam et de ses conseillers, mais face aux soubresauts de la nature, le vaillant félin et ses bras droits se retrouvent bien impuissants. C’est là que les choses vont s’envenimer. Au sens propre comme au figuré. En effet, alors que la forêt est ravagée par une nouvelle secousse, Balam périt en tentant de protéger la tribu. Un voile de désespoir s’abat ainsi sur Xo. Survient alors Zaina, une vipère aussi opportuniste que charismatique qui a toujours rêvé de prendre la place du jaguar à la tête de la communauté. Profitant du désarroi de ses compatriotes, et sans même leur laisser le temps de pleurer la disparition de leur noble protecteur, la voilà qui prend les commandes et entraîne la meute dans une marche forcée vers une soi-disant terre promise où ils pourront tous vivre à l’abri du danger, leur faisant miroiter monts et merveilles quand bien même elle sera vraisemblablement la seule à qui cet exode profitera. Évidemment, Nachi et les anciens lieutenants de Balam y voient clair dans son jeu, mais les belles paroles de Zaina suffisent hélas à séduire le reste de la horde et ils n’ont pas d’autre choix que de suivre le mouvement, refusant d’abandonner les leurs aux caprices de la vipère. Une perspective qui est loin de plaire au jeune coati. Mais alors qu’il doit choisir entre suivre les siens ou rester à Xo, le garçon apprend par Cocopa, le sorcier de la tribu, que s’il ne retrouve pas sa vraie famille avant trois jours, celle-ci périra. Plus le temps de tergiverser. Sur les conseils du devin, l’intrépide Nachi part ainsi en quête de l’Arbre de Vie et de la "bouche qui ne parle pas", seuls indices dont il dispose pour retrouver son clan et le sauver d’une fin certaine. C’est une double course contre la montre qui s’engage alors. Car si les jours de la famille de Nachi sont comptés, l’égocentrisme de Zaina risque également de mener les habitants de Xo à leur perte. Ce pourrait-il néanmoins que les paroles de Cocopa cachent une autre vérité ? Accompagné de son ami Pako, une grenouille de verre qui n’a manifestement pas la lumière à tous les étages mais dont le coeur est indéniablement à la bonne place (vous pouvez vérifier par vous-mêmes ; la peau de son thorax et de son abdomen est transparente :p ), notre héros poilu embarque ainsi pour un périple semé d’embûches mais ô combien haut en couleur. On ne va pas se mentir, sur le plan scénaristique, le film ne casse pas des briques. C’est le récit classique du jeune en quête d’identité qui part à la recherche de ses origines, bravant tous les périls pour faire l’apprentissage de l’amitié et découvrir que les réponses qu’il cherchait étaient en lui depuis le début. Rien de bien nouveau, même si l’aventure demeure plaisante et les personnages attachants (je ne doute pas que Pako en tapera sur les nerfs de plus d’un, mais en ce qui me concerne, je l’ai trouvé plutôt sympathique). Sur le plan visuel, en revanche, le film est un véritable festin. L’objectif avoué du réalisateur était de faire tomber le spectateur "amoureux" de la forêt tropicale latino-américaine, et à ce titre, je pense qu’on peut dire que le film est une réussite. La somptuosité avec laquelle Koati dépeint la richesse de cet écosystème est d’une splendeur et d’une luminosité à couper le souffle. D’autant que le film fait le pari d’une animation entièrement en 2D, cherchant à évoquer comme un sentiment d’indescriptible nostalgie. On notera quelques transitions un peu maladroites ici et là, mais dans l’ensemble, le résultat est assurément à la hauteur de ses ambitions. Personnellement, c’est le passage de l’Arbre de Vie que j’ai trouvé le plus époustouflant. Sans entrer dans les détails, la majesté du paysage m’a tout simplement subjugué... Pour le reste, vous l’aurez compris, le spectacle est au rendez-vous. Un vrai feu d’artifice. Le réalisateur et son équipe signent avec Koati une fable enchanteresse et chaleureuse devant laquelle vous ne manquerez pas de passer un bon moment. Vraiment, je ne peux que vous recommander de jeter un coup d’oeil au film. Je ne sais pas s’il fera date, mais il laisse en tout cas un souvenir d’une rare beauté...
- Operago (Rayna Buxton)
https://www.youtube.com/watch?v=JhW1LdCmJFo
Parce qu’on ne pouvait pas célébrer le mois des morts sans parler au moins une fois de spectres et de revenants. :p Brio et Drusilla sont deux chasseuses de fantômes aux caractères bien trempés. Sur leur mobylette, elles parcourent le monde en quête de sensations fortes et d’âmes tourmentées à renvoyer dans la tombe. Justement, alors que les deux baroudeuses sont de passage dans une petite ville perdue en pleine campagne, un chant sépulcral s’élève du théâtre abandonné qui se dresse sur la falaise surplombant la bourgade. Le charmant village est aussitôt submergé - dans tous les sens du terme - par une horde d’ectoplasmes visqueux. Soldats sans visages à la solde d’une diva d’outre-tombe qui en a manifestement assez de chanter pour des sièges vides, les voilà qui se mettent à enlever les habitants pour remplir la salle de concert qu’hante leur maîtresse, un auditoire que la cantatrice fantomatique a bien l’intention de régaler pour le reste de l’éternité... Heureusement, Brio et Drusilla sont là pour mettre un terme à ce sinistre récital. Et avec style, s’il vous plaît. Le court-métrage étant un projet d’études, l’animation et la mise en scène sont naturellement encore un peu maladroites, mais le résultat ne manque pas pour autant de panache. La pâleur spectrale de la palette employée par l’artiste contraste joliment avec l’explosion de couleurs que proposait Koati, et son coup de crayon, d’une extravagance rare, interpelle aussi sûrement qu’il envoûte. On sent que le réalisateur s’est amusé avec les formes et les textures. L’image a un petit côté "scrapbook", comme si on l’avait décorée avec des chutes de tissu et de papier peint, que je trouve tout à fait charmant. D’autant que le character design a de la personnalité à revendre. En fait, que ce soit au niveau de leur apparence ou de leurs caractères, Drusilla et Brio me font un peu penser à Perle et Améthyste (de Steven Universe, cela va sans dire). D’un côté, on a la grande perche un peu guindée dont le sérieux et les remontrances dissimulent une âme forte et protectrice ; de l’autre, la rebelle rondouillarde qui prend les choses avec philosophie et fait toujours preuve de bonne volonté en dépit d’une certaine maladresse. Pourtant, malgré leurs différences, on sent qu’elles n’hésiteraient pas à aller jusqu’au bout du monde l’une pour l’autre, et c’est bien ça qui compte. En tout cas, cette dynamique pétillante ne manque pas de conférer une certaine fraîcheur au récit. Porté par une écriture pleine de piquant et d’esprit... au sens propre comme au figuré, Operago est vraiment un court-métrage qui vous donne envie d’en voir plus. À quand la série ? :p
- "Welcome To The Internet" from Bo Burnham's INSIDE - Cover by Justine M. (Justine's Mic)
https://www.youtube.com/watch?v=IWMNS1v_4RA
J’imagine que le titre de la vidéo résume déjà assez bien les choses. Ce qui vous attend à l’autre bout du lien est donc une reprise de la chanson "Welcome To The Internet", une ballade satirique diaboliquement entraînante que le comédien Bo Burnham a interprétée pour la première fois en 2021 dans son film Inside, une sorte d’essai cinématographico-musical que l’artiste a produit en plein coeur de la pandémie depuis l’intimité solitaire de sa demeure. Là aussi, le titre du morceau annonce à lui tout seul la couleur. Imaginez un instant que vous n’ayez jamais visité Internet de votre vie. C’est votre première fois, et voilà qu’un exubérant personnage - que je serais tenté de surnommer le "Navigateur" (ou la Navigatrice, dans le cas du cover dont je vous ai donné le lien) - apparaît sur votre écran pour vous souhaiter la bienvenue. Tel un Monsieur Loyal numérique, cet étrange guide des espaces virtuels vous fait alors faire le tour du propriétaire, passant en revue tout ce que le "world wide web" a à offrir. De merveilles en dérives, vous voilà entraîné dans un tourbillon d’infinies possibilités, une farandole endiablée de contenu telle que vous n’en avez jamais vue auparavant. Bienvenue sur Internet, le pays de vos rêves les plus fous. Vous l’aurez compris, le morceau est une réflexion aussi drôle que pertinente sur la place que le Net a prise dans nos vies depuis le début des années 2000 et la façon dont le réseau nous a fait prisonniers de sa toile en nous offrant tout ce que l’on pouvait imaginé. Ce qui commence comme un numéro enjoué et accueillant se transforme peu à peu en torrent frénétique, tandis que le spectateur prend conscience de ce que c’est que d’avoir "le monde entier dans la main". Pour le meilleur comme pour le pire. Une cyber-descente aux enfers portée par le cynisme guilleret du Navigateur, incarnation parfaite de la démence et de la démesure de tout ce qu’Internet a mis à notre disposition. Pourtant, il y a aussi quelque chose d’émouvant et de sublime dans cette curieuse co-dépendance qui s’est nouée entre le spectateur et ce réseau tentaculaire. Dans un rare élan de sincérité, le Navigateur revient ainsi sur son histoire, de ses débuts hésitants jusqu’à l’ère du tout numérique. Comme de vieux amis, nous avons grandi ensemble, nous avons évolué au contact l’un de l’autre, nous nous sommes inspirés l'un l'autre. Au bout du compte, les mille et un visages d’Internet ne sont que le reflet de l’humanité, éternellement destinée à la fois à la folie et à la grandeur... Oui, bon, j’en fais peut-être un peu trop. Mais ce n’est pas ma faute si cette chanson réveille ma fibre philosophique. :p Pour le reste, je vous avouerai que je n’ai pas grand-chose à ajouter sur le cover lui-même, mais je souhaiterais néanmoins saluer la performance de la chanteuse. Elle a parfaitement réussi à capturer l’entrain carnavalesque de l’original. Je me souviens d’un commentaire qui faisait remarquer que sa prestation aurait tout à fait pu coller à la Reine du Cyberespace, de Deltarune, et très franchement, je trouve que la comparaison décrit assez bien la fougue délirante et irrévérencieuse qui se dégage du morceau. Sublimée par une interprétation picturale qui réussit à capturer l’esprit du titre de manière éclatante, voilà assurément une reprise qui n’a pas à rougir devant l’original. Vous aussi, vous vous laisserez bien tenter par un peu de tout et n’importe quoi ? :3
Voili-voilà, j’espère que ce petit bulletin aura contribué un tant soit peu à dissiper la morosité de novembre. Comme d’habitude, n’hésitez pas à me faire part de vos remarques en commentaires. ;) Et si vous n’avez toujours pas eu votre dose de couleurs, je vous recommande aussi le film Charlotte, qui est sorti récemment, une très belle fresque animée inspirée de l’oeuvre et du destin bouleversant de la peintre juive allemande Charlotte Salomon. Une vraie pépite. Pour le reste, c’est une nouvelle fin d’année qui se profile à l’horizon. En ce qui concerne le prochain numéro, je ne prévois pas quoi que ce soit de spécial pour l’occasion, mais j’essaierai tout de même de marquer le coup. D’ici là, portez-vous bien, et n’allez pas commettre d’imprudences. N’oubliez pas que le convive indésirable qui s’invite à nos tables depuis la fin de la dernière décennie court toujours. Alors protégez-vous, et protégez ceux qui vous sont chers, de sorte à n’avoir aucun regret lorsque viendra l’An Nouveau. Sur ce, je vous souhaite bonne continuation, et à bientôt pour une nouvelle édition. Bye-bye les p’tits loups. ^_^
FA+
