
Special package commission writting + illustration for
theojeca.
Text is in french because the commissioner is French, I won't translate it. Sorry guys. ;)
Dix minutes, ça faisait à peine dix minutes qu'il était là à se les peler sur ce banc froid comme de la pierre... Un banc en bois ! Comment ça pouvait devenir aussi glacé ! Bref, dix minutes donc, et il avait déjà le sentiment qu'il allait se transformer en bâton d'esquimau sur son bout de bois... Le pauvre Wallaby renifla, le bus était en retard et le paysage bien monotone pour lui tenir compagnie. De la fichue poudreuse à perte de vue et pas âme qui vive à des kilomètres alentour... Oh il y avait encore quinze jours de cela, il avait trouvé le coin drôlement rustique et le côté nature sauvage de l'endroit vraiment séduisant. Sauf qu'après un mois à traîner les pattes dans des mètres de neige matin et soir pour rejoindre son appartement la beauté des lieux lui paraissait à présent bien plus glaciale et hostile... Il en venait même à se demander ce qui avait bien pu le pousser à vouloir faire son stage de fin d'année ici, si loin de son Australie natale dans ce pays sauvage. Ah oui, une belle opportunité de se dépayser un bon coup avant d'aller s'enterrer dans la paperasse et les études statistiques en entrant de plein pieds dans le monde du travail. Le Canada lui avait paru être l'endroit idéal pour ça, carrément à l'autre bout de la planète et Deep Cove niveau température et climat c'était l'exact opposé de Brisbane. Bon, d'accord, de base, il avait visé Vancouver, et c'était d'ailleurs là qu'il devait effectuer son stage de fin de cursus, mais il avait refusé de s'enfermer dans un clapier à lapin dans une cité universitaire. Il tenait à son espace personnel et partager une chambre avec un colocataire pour quelqu'un d'aussi méticuleux que lui... Non, il n'était pas maniaque, mais, il aurait suffi qu'il tombe sur quelqu'un de moins organisé et ordonné que lui et ça aurait été une catastrophe. Bref, le souci, c'était qu'il n'avait rien trouvé dans des prix raisonnables si ce n'était ici, à Deep Cove, un coin paumé de chez paumé. Maintenant qu'il y réfléchissait, tout ça n'avait été qu'une suite de choix, SES choix. Alors le seul responsable de la galère dans laquelle il se trouvait c'était lui-même... Ouais, ça donnait à réfléchir... et à relativiser... N'empêche qu'il était bien là, maintenant tout de suite, à se les geler aux aurores, sur ce banc inconfortable en attendant un bus sans cesse retardé par la neige et le verglas, malgré ses grosses chaussettes en laine dans ses boots en cuir bien fermées, son pantalon noir en jean, son tee-shirt à manches longues, le chandail qu'il avait passé par-dessus et l'épais manteau style trench-coat en laine marron qui recouvrait le tout.
Le jeune marsupial à la tignasse châtain épaisse, même si coupée court, dont des mèches s'échappaient ci et là de sous son bonnet gris plomb, renifla pour la énième fois en grelottant avant de soupirer de dépit. Fichu temps, fichue nature, fichues idées à la con... Encore trois mois à tirer et il pourrait rentrer... Le temps allait lui sembler long... Et ce stage interminable...
Alors qu'il enfonçait ses mains toujours plus profond dans les poches de son trench, il capta comme une sorte de crissement sur sa droite, caractéristique du bruit que faisait la neige sous le pas de ceux qui osaient la braver et la fouler courageusement pour la piétiner dans une lutte pourtant perdue d'avance. Il n'eut même pas le temps de tourner la tête qu'elle était là, la bouche en cœur, un immense sourire sur les babines et toute la bonne humeur du monde sur le visage tandis qu'elle saluait le seul autre occupant du banc.
« Salut ! Ça dérange pas si je m'assois ? Bah non, bien sûr, ce que je peux être bête, le banc est à tout le monde ! »
Oui, une fille, qui devait avoir à peu près son âge, la vingtaine passée donc, une Husky à la chevelure presque blonde, plus vraiment châtain, comme perdue dans un entre-deux de couleurs peu ordinaires, elle était mi-longue et coupée en un dégradé de franges et de mèches hétérogène assez... psychédélique... Qu'ils soient parfaitement lissés donnait à sa coiffure un aspect encore plus... détonnant... Ses yeux en amande couleur noisette pétillaient et renforçaient le sentiment étrange chez le Wallaby d'avoir à faire à une forte personnalité. Seulement, il avait du mal à définir si c'était simplement de la malice un poil arrogante qu'il dénotait chez elle ou une sorte d'insouciante gaieté. La façon dont elle l'avait abordé n'avait pas clairement aidé à se faire une idée du personnage... Mais qu'elle débarque ainsi, littéralement, de ce néant blanc auquel il s'était presque habitué l'intrigua suffisamment pour qu'il lui témoigne un réel intérêt. Il esquissa alors ce qui devait ressembler à un sourire crispé, plus à cause du froid qui lui gerçait les lèvres que de la nervosité qu'il éprouvait de soudain voir miraculeusement son monde de silence et de vide être rempli d'une vie nouvelle. Le personnage donc, puisqu'il continua discrètement à l'étudier du coin de l'œil, devait être originaire de la région à n'en pas douter. Parce que porter un manteau aussi léger et court et un simple jean bleu skinny par ce froid... C'était ça où elle était née avec une absence totale de sensibilité au niveau des terminaisons nerveuses de la peau. Elle avait bien une écharpe en laine, bien épaisse, bariolée de couleurs vives, qui était presque une injure faite à la blancheur immaculée qui les régnait en maître incontesté partout autour d'eux, mais elle l'avait nouée autour de sa taille en lieu et place se ceinture pour maintenir sa veste en daim fermée. Une écharpe... Voilà ce qu'il avait oublié de prendre en partant ce matin...
« Vous, vous êtes pas du coin, hein ? Ça se voit. »
Elle s'était penchée légèrement dans sa direction dans ce qui ressemblait à une nouvelle tentative de dialogue, toujours avec ce sourire franc, et ça lui avait fait l'effet d'un électrochoc. Sa fierté de mâle venait d'en prendre un coup. La petite provinciale avait bien flairé l'étranger paumé qu'il était... Pour le coup, il se renfrogna et serra les dents pour ne pas claquer des dents en essayant de se donner un air digne. Mais il avait le sentiment qu'il devait plus paraître ridicule à chercher à redresser ses épaules étroites et son torse riquiqui comme il le faisait. Tant pis, il n'en était pas moins fier de ses origines et il ne laisserait pas cette fille de l'« Up North » le ridiculiser si facilement !
La fille leva alors soudainement ses deux mains découvertes et les agita de gauche à droite en faisant de même avec la tête dans une expression navrée.
« Le prenez pas mal ! C'était juste une remarque. C'est mon premier jour de travail aujourd'hui alors je suis un peu nerveuse... Et quand je suis nerveuse je cause et je fais pas gaffe à ce que je dis... Je peux être un vrai moulin à paroles ! Mais pour sûr, je voulais juste vous demander gentiment ce que vous êtes venu faire par ici, vous pouvez me croire ! »
Elle appuya sa vive explication par le geste de ses mains qu'elle joignit en croisant ses doigts pour implorer la clémence de son interlocuteur. Ce fut alors le déclic et les paroles appuyées par l'expression réellement sincère de la jeune femme finirent par faire sortir le Wallaby du mutisme dans lequel il s'était terré. D'autant qu'il était difficile de continuer à faire du mauvais esprit avec l'inquiétude qu'il lisait dans ses grands yeux en quête de pardon qu'il cherchait pourtant habilement à fuir. Les filles avaient ce pouvoir. Et les hommes étaient bien faibles quand il s'agissait de lutter contre. Encore fallait-il vraiment vouloir lutter.
Ses lèvres s'entrouvrirent lentement, avec toute la délicatesse d'une prudente hésitation, et finalement, il lâcha d'une traite sur un ton quelque peu monocorde :
« Je viens d'Australie. Je suis venu ici pour effectuer mon stage de fin d'études à Vancouver. Pour... achever mon parcours universitaire et obtenir mon diplôme en études statistiques. Oui je sais... ça fait loin pour un stage de ce genre... »
C'était comme si elle venait de lui dérober un secret, et il enfonça sa tête dans ses épaules, appréhendant déjà qu'elle en fasse une mauvaise utilisation. C'était idiot, il ne la connaissait même pas. Et il n'avait fait que la juger à son apparence depuis qu'elle avait eu la gentillesse de venir partager sa solitude avec lui, sur ce banc froid qu'elle réchauffait avec tant de bonté par sa seule présence. Elle aurait pu l'ignorer pourtant. Elle aurait pu attendre là, silencieusement, sans avoir même besoin de faire semblant de ne pas l'avoir remarqué. Oui c'était idiot, et il se sentait maintenant parfaitement crétin de ne lui avoir offert en retour que l'expression de son ego masculin brutal auquel se heurter douloureusement.
Il baissa les yeux, bien moins fier assurément. C'est là qu'elle s'extasia carrément en lâchant quelques onomatopées qui témoignaient ouvertement d'une certaine envie, à moins que ça ne soit de l'étonnement ? Il avait encore une fois du mal à le dire et c'est quelque peu dubitatif qu'il tourna de nouveau les yeux vers la Husky au caractère décidément bien enjoué.
« C'est carrément trop génial ! Et super courageux ! Moi je sais pas si j'aurais osé partir si loin pour faire un stage ! Il faut vraiment ne pas avoir froid aux yeux et avoir les tripes bien accrochées pour tenter une aventure de ce genre ! Déjà que moi je suis morte de trouille à l'idée de remettre les pieds à Vancouver et de devoir tous les jours laisser ma petite ville tranquille derrière moi ! Sérieusement, j'admire les personnes qui sont capables de prendre ce genre de belles initiatives. Oui ça fait loin, c'est sûr, mais ça doit être une expérience tellement géniale à vivre ! »
Le Wallaby en resta muet et dût bien cligner des yeux une demi-dizaine de fois avant de réaliser qu'elle venait tout juste de tenir des propos plus qu'élogieux à l'égard du projet dans lequel il s'était lancé et qu'il commençait à trouver complètement stupide lui. Mieux même, elle le gratifiait d'avoir sur faire preuve d'autant de courage. Il prit le temps d'assimiler cette réaction inattendue. Et seulement alors sa vision sur ce qui l'entourait commença à changer peu à peu. À commencer par la façon dont il avait perçu cette fille jusque là.
Woaoh. Il avait l'impression qu'on venait d'arracher le voile qui lui couvrait la vue jusque là. Et finalement, si on oubliait le froid et la pauvreté des tons, c'est vrai que ce coin de nature si paisible avait du charme. En fait, est-ce que ce n'était pas ce qu'il était venu chercher ici ? Un monde à l'exact opposé de ce qu'il connaitrait par la suite chaque jour de sa vie ? Une belle initiative. Oui, c'était peut-être bien ce qu'il avait besoin d'entendre dans le fond. Cette fille, elle avait avec une telle facilité. C'en était à se demander si elle n'était pas un peu télépathe. Ou bien magicienne.
L'idée lui décocha un sourire en coin. Elle ne correspondait tellement pas au cliché qu'on pouvait s'en faire dans les jeux vidéos ou dans les livres. Mais, qui pouvait se vanter d'avoir déjà croisé la route d'une magicienne de son vivant ? Non, elle n'était peut-être pas un cliché vivant, mais en tous cas, elle était plutôt en harmonie avec la saison et le lieu avec sa fourrure soyeuse et pelucheuse blanche et chocolat. Qu'il devait faire bon se sentir sous ce manteau naturel bien plus adapté aux basses températures que ne l'était son manteau synthétique pourtant étudié pour. Indubitablement, c'était d'un autre œil qu'il considérait maintenant son interlocutrice lorsqu'il lui répondit dans un sourire bien plus chaleureux et maladroit aussi, un peu :
« Oui. Oui c'est ce que je m'étais dit aussi.
- Hé ! Mais j'y pense ! Je vais prendre ce bus tous les matins maintenant, alors ça nous donnerait plein de temps pour que tu me racontes à quoi ressemble le pays d'où tu viens. Ça pourrait être chouette, ce serait comme partir en voyage chaque matin avant d'aller travailler, mais sans les désagréments du décalage horaire. »
Cette idée était folle. Complètement frappée. Mais il y avait quelque chose d'attirant dans cette idée saugrenue, follement attirant. Il eut d'ailleurs bien du mal à ne pas rire. Mais oui, oui, il appréciait l'idée. Alors il répondit tout simplement, comme si c'était une idée pleine de bon sens :
« Pourquoi pas ? C'est toujours plus sympa de voyager à deux de toute façon.
- Là je suis bien d'accord ! Moi c'est Bianca, ravie de faire votre connaissance co-voyageur.
- Max, le plaisir est partagé, chère co-voyageuse. »
Et, sans s'en rendre compte, il parvint à sortir sa main pourtant si frileuse de la poche droite de son manteau pour la tendre à la jeune femme du nom de Bianca. Le sourire débordant de chaleur et d'enthousiasme qu'elle lui offrit en retour lui parut alors être une récompense amplement suffisante. Quoique, la promesse de ne plus se retrouver seul sur ce banc chaque matin à ressasser ses souvenirs de chez lui, mais à les partager en charmante compagnie, n'en était-elle pas une autre autrement plus plaisante encore ?
Il réfléchissait à cette perspective plus que réconfortante et elle lui étreignit la main pour se rendre compte qu'elle était glacée. Ni une ni eux, elle se leva et détacha l'écharpe de sa taille pour l'emmitoufler autour de la main du jeune homme. Elle lui demanda ensuite de lui tendre son autre main et elle la recouvrit de la même manière, le Wallaby se mettant à rire de bon cœur en la regardant faire une autre de ces choses assez improbables qu'elle seule semblait être à même de faire. Elle ne comprit d'abord pas, et puis, ils rirent en chœur avant d'entamer une conversation ouvertement amicale en attendant l'arrivée du bus.
Finalement, il y avait peut-être bien du bon dans l'idée farfelue qu'il avait eu de venir s'enterrer ici, en pleine banquise. Et Le Saux avait sans doute raison : « Le soleil ne se lève que pour celui qui va à sa rencontre ». Alors maintenant qu'il avait enfin croisé sa route, il comptait bien faire de son mieux pour ne plus laisser sa douce chaleur rassérénante lui filer entre les doigts à nouveau.
Writting + drawing from me.
Characters are
theojeca's property.

Text is in french because the commissioner is French, I won't translate it. Sorry guys. ;)
Dix minutes, ça faisait à peine dix minutes qu'il était là à se les peler sur ce banc froid comme de la pierre... Un banc en bois ! Comment ça pouvait devenir aussi glacé ! Bref, dix minutes donc, et il avait déjà le sentiment qu'il allait se transformer en bâton d'esquimau sur son bout de bois... Le pauvre Wallaby renifla, le bus était en retard et le paysage bien monotone pour lui tenir compagnie. De la fichue poudreuse à perte de vue et pas âme qui vive à des kilomètres alentour... Oh il y avait encore quinze jours de cela, il avait trouvé le coin drôlement rustique et le côté nature sauvage de l'endroit vraiment séduisant. Sauf qu'après un mois à traîner les pattes dans des mètres de neige matin et soir pour rejoindre son appartement la beauté des lieux lui paraissait à présent bien plus glaciale et hostile... Il en venait même à se demander ce qui avait bien pu le pousser à vouloir faire son stage de fin d'année ici, si loin de son Australie natale dans ce pays sauvage. Ah oui, une belle opportunité de se dépayser un bon coup avant d'aller s'enterrer dans la paperasse et les études statistiques en entrant de plein pieds dans le monde du travail. Le Canada lui avait paru être l'endroit idéal pour ça, carrément à l'autre bout de la planète et Deep Cove niveau température et climat c'était l'exact opposé de Brisbane. Bon, d'accord, de base, il avait visé Vancouver, et c'était d'ailleurs là qu'il devait effectuer son stage de fin de cursus, mais il avait refusé de s'enfermer dans un clapier à lapin dans une cité universitaire. Il tenait à son espace personnel et partager une chambre avec un colocataire pour quelqu'un d'aussi méticuleux que lui... Non, il n'était pas maniaque, mais, il aurait suffi qu'il tombe sur quelqu'un de moins organisé et ordonné que lui et ça aurait été une catastrophe. Bref, le souci, c'était qu'il n'avait rien trouvé dans des prix raisonnables si ce n'était ici, à Deep Cove, un coin paumé de chez paumé. Maintenant qu'il y réfléchissait, tout ça n'avait été qu'une suite de choix, SES choix. Alors le seul responsable de la galère dans laquelle il se trouvait c'était lui-même... Ouais, ça donnait à réfléchir... et à relativiser... N'empêche qu'il était bien là, maintenant tout de suite, à se les geler aux aurores, sur ce banc inconfortable en attendant un bus sans cesse retardé par la neige et le verglas, malgré ses grosses chaussettes en laine dans ses boots en cuir bien fermées, son pantalon noir en jean, son tee-shirt à manches longues, le chandail qu'il avait passé par-dessus et l'épais manteau style trench-coat en laine marron qui recouvrait le tout.
Le jeune marsupial à la tignasse châtain épaisse, même si coupée court, dont des mèches s'échappaient ci et là de sous son bonnet gris plomb, renifla pour la énième fois en grelottant avant de soupirer de dépit. Fichu temps, fichue nature, fichues idées à la con... Encore trois mois à tirer et il pourrait rentrer... Le temps allait lui sembler long... Et ce stage interminable...
Alors qu'il enfonçait ses mains toujours plus profond dans les poches de son trench, il capta comme une sorte de crissement sur sa droite, caractéristique du bruit que faisait la neige sous le pas de ceux qui osaient la braver et la fouler courageusement pour la piétiner dans une lutte pourtant perdue d'avance. Il n'eut même pas le temps de tourner la tête qu'elle était là, la bouche en cœur, un immense sourire sur les babines et toute la bonne humeur du monde sur le visage tandis qu'elle saluait le seul autre occupant du banc.
« Salut ! Ça dérange pas si je m'assois ? Bah non, bien sûr, ce que je peux être bête, le banc est à tout le monde ! »
Oui, une fille, qui devait avoir à peu près son âge, la vingtaine passée donc, une Husky à la chevelure presque blonde, plus vraiment châtain, comme perdue dans un entre-deux de couleurs peu ordinaires, elle était mi-longue et coupée en un dégradé de franges et de mèches hétérogène assez... psychédélique... Qu'ils soient parfaitement lissés donnait à sa coiffure un aspect encore plus... détonnant... Ses yeux en amande couleur noisette pétillaient et renforçaient le sentiment étrange chez le Wallaby d'avoir à faire à une forte personnalité. Seulement, il avait du mal à définir si c'était simplement de la malice un poil arrogante qu'il dénotait chez elle ou une sorte d'insouciante gaieté. La façon dont elle l'avait abordé n'avait pas clairement aidé à se faire une idée du personnage... Mais qu'elle débarque ainsi, littéralement, de ce néant blanc auquel il s'était presque habitué l'intrigua suffisamment pour qu'il lui témoigne un réel intérêt. Il esquissa alors ce qui devait ressembler à un sourire crispé, plus à cause du froid qui lui gerçait les lèvres que de la nervosité qu'il éprouvait de soudain voir miraculeusement son monde de silence et de vide être rempli d'une vie nouvelle. Le personnage donc, puisqu'il continua discrètement à l'étudier du coin de l'œil, devait être originaire de la région à n'en pas douter. Parce que porter un manteau aussi léger et court et un simple jean bleu skinny par ce froid... C'était ça où elle était née avec une absence totale de sensibilité au niveau des terminaisons nerveuses de la peau. Elle avait bien une écharpe en laine, bien épaisse, bariolée de couleurs vives, qui était presque une injure faite à la blancheur immaculée qui les régnait en maître incontesté partout autour d'eux, mais elle l'avait nouée autour de sa taille en lieu et place se ceinture pour maintenir sa veste en daim fermée. Une écharpe... Voilà ce qu'il avait oublié de prendre en partant ce matin...
« Vous, vous êtes pas du coin, hein ? Ça se voit. »
Elle s'était penchée légèrement dans sa direction dans ce qui ressemblait à une nouvelle tentative de dialogue, toujours avec ce sourire franc, et ça lui avait fait l'effet d'un électrochoc. Sa fierté de mâle venait d'en prendre un coup. La petite provinciale avait bien flairé l'étranger paumé qu'il était... Pour le coup, il se renfrogna et serra les dents pour ne pas claquer des dents en essayant de se donner un air digne. Mais il avait le sentiment qu'il devait plus paraître ridicule à chercher à redresser ses épaules étroites et son torse riquiqui comme il le faisait. Tant pis, il n'en était pas moins fier de ses origines et il ne laisserait pas cette fille de l'« Up North » le ridiculiser si facilement !
La fille leva alors soudainement ses deux mains découvertes et les agita de gauche à droite en faisant de même avec la tête dans une expression navrée.
« Le prenez pas mal ! C'était juste une remarque. C'est mon premier jour de travail aujourd'hui alors je suis un peu nerveuse... Et quand je suis nerveuse je cause et je fais pas gaffe à ce que je dis... Je peux être un vrai moulin à paroles ! Mais pour sûr, je voulais juste vous demander gentiment ce que vous êtes venu faire par ici, vous pouvez me croire ! »
Elle appuya sa vive explication par le geste de ses mains qu'elle joignit en croisant ses doigts pour implorer la clémence de son interlocuteur. Ce fut alors le déclic et les paroles appuyées par l'expression réellement sincère de la jeune femme finirent par faire sortir le Wallaby du mutisme dans lequel il s'était terré. D'autant qu'il était difficile de continuer à faire du mauvais esprit avec l'inquiétude qu'il lisait dans ses grands yeux en quête de pardon qu'il cherchait pourtant habilement à fuir. Les filles avaient ce pouvoir. Et les hommes étaient bien faibles quand il s'agissait de lutter contre. Encore fallait-il vraiment vouloir lutter.
Ses lèvres s'entrouvrirent lentement, avec toute la délicatesse d'une prudente hésitation, et finalement, il lâcha d'une traite sur un ton quelque peu monocorde :
« Je viens d'Australie. Je suis venu ici pour effectuer mon stage de fin d'études à Vancouver. Pour... achever mon parcours universitaire et obtenir mon diplôme en études statistiques. Oui je sais... ça fait loin pour un stage de ce genre... »
C'était comme si elle venait de lui dérober un secret, et il enfonça sa tête dans ses épaules, appréhendant déjà qu'elle en fasse une mauvaise utilisation. C'était idiot, il ne la connaissait même pas. Et il n'avait fait que la juger à son apparence depuis qu'elle avait eu la gentillesse de venir partager sa solitude avec lui, sur ce banc froid qu'elle réchauffait avec tant de bonté par sa seule présence. Elle aurait pu l'ignorer pourtant. Elle aurait pu attendre là, silencieusement, sans avoir même besoin de faire semblant de ne pas l'avoir remarqué. Oui c'était idiot, et il se sentait maintenant parfaitement crétin de ne lui avoir offert en retour que l'expression de son ego masculin brutal auquel se heurter douloureusement.
Il baissa les yeux, bien moins fier assurément. C'est là qu'elle s'extasia carrément en lâchant quelques onomatopées qui témoignaient ouvertement d'une certaine envie, à moins que ça ne soit de l'étonnement ? Il avait encore une fois du mal à le dire et c'est quelque peu dubitatif qu'il tourna de nouveau les yeux vers la Husky au caractère décidément bien enjoué.
« C'est carrément trop génial ! Et super courageux ! Moi je sais pas si j'aurais osé partir si loin pour faire un stage ! Il faut vraiment ne pas avoir froid aux yeux et avoir les tripes bien accrochées pour tenter une aventure de ce genre ! Déjà que moi je suis morte de trouille à l'idée de remettre les pieds à Vancouver et de devoir tous les jours laisser ma petite ville tranquille derrière moi ! Sérieusement, j'admire les personnes qui sont capables de prendre ce genre de belles initiatives. Oui ça fait loin, c'est sûr, mais ça doit être une expérience tellement géniale à vivre ! »
Le Wallaby en resta muet et dût bien cligner des yeux une demi-dizaine de fois avant de réaliser qu'elle venait tout juste de tenir des propos plus qu'élogieux à l'égard du projet dans lequel il s'était lancé et qu'il commençait à trouver complètement stupide lui. Mieux même, elle le gratifiait d'avoir sur faire preuve d'autant de courage. Il prit le temps d'assimiler cette réaction inattendue. Et seulement alors sa vision sur ce qui l'entourait commença à changer peu à peu. À commencer par la façon dont il avait perçu cette fille jusque là.
Woaoh. Il avait l'impression qu'on venait d'arracher le voile qui lui couvrait la vue jusque là. Et finalement, si on oubliait le froid et la pauvreté des tons, c'est vrai que ce coin de nature si paisible avait du charme. En fait, est-ce que ce n'était pas ce qu'il était venu chercher ici ? Un monde à l'exact opposé de ce qu'il connaitrait par la suite chaque jour de sa vie ? Une belle initiative. Oui, c'était peut-être bien ce qu'il avait besoin d'entendre dans le fond. Cette fille, elle avait avec une telle facilité. C'en était à se demander si elle n'était pas un peu télépathe. Ou bien magicienne.
L'idée lui décocha un sourire en coin. Elle ne correspondait tellement pas au cliché qu'on pouvait s'en faire dans les jeux vidéos ou dans les livres. Mais, qui pouvait se vanter d'avoir déjà croisé la route d'une magicienne de son vivant ? Non, elle n'était peut-être pas un cliché vivant, mais en tous cas, elle était plutôt en harmonie avec la saison et le lieu avec sa fourrure soyeuse et pelucheuse blanche et chocolat. Qu'il devait faire bon se sentir sous ce manteau naturel bien plus adapté aux basses températures que ne l'était son manteau synthétique pourtant étudié pour. Indubitablement, c'était d'un autre œil qu'il considérait maintenant son interlocutrice lorsqu'il lui répondit dans un sourire bien plus chaleureux et maladroit aussi, un peu :
« Oui. Oui c'est ce que je m'étais dit aussi.
- Hé ! Mais j'y pense ! Je vais prendre ce bus tous les matins maintenant, alors ça nous donnerait plein de temps pour que tu me racontes à quoi ressemble le pays d'où tu viens. Ça pourrait être chouette, ce serait comme partir en voyage chaque matin avant d'aller travailler, mais sans les désagréments du décalage horaire. »
Cette idée était folle. Complètement frappée. Mais il y avait quelque chose d'attirant dans cette idée saugrenue, follement attirant. Il eut d'ailleurs bien du mal à ne pas rire. Mais oui, oui, il appréciait l'idée. Alors il répondit tout simplement, comme si c'était une idée pleine de bon sens :
« Pourquoi pas ? C'est toujours plus sympa de voyager à deux de toute façon.
- Là je suis bien d'accord ! Moi c'est Bianca, ravie de faire votre connaissance co-voyageur.
- Max, le plaisir est partagé, chère co-voyageuse. »
Et, sans s'en rendre compte, il parvint à sortir sa main pourtant si frileuse de la poche droite de son manteau pour la tendre à la jeune femme du nom de Bianca. Le sourire débordant de chaleur et d'enthousiasme qu'elle lui offrit en retour lui parut alors être une récompense amplement suffisante. Quoique, la promesse de ne plus se retrouver seul sur ce banc chaque matin à ressasser ses souvenirs de chez lui, mais à les partager en charmante compagnie, n'en était-elle pas une autre autrement plus plaisante encore ?
Il réfléchissait à cette perspective plus que réconfortante et elle lui étreignit la main pour se rendre compte qu'elle était glacée. Ni une ni eux, elle se leva et détacha l'écharpe de sa taille pour l'emmitoufler autour de la main du jeune homme. Elle lui demanda ensuite de lui tendre son autre main et elle la recouvrit de la même manière, le Wallaby se mettant à rire de bon cœur en la regardant faire une autre de ces choses assez improbables qu'elle seule semblait être à même de faire. Elle ne comprit d'abord pas, et puis, ils rirent en chœur avant d'entamer une conversation ouvertement amicale en attendant l'arrivée du bus.
Finalement, il y avait peut-être bien du bon dans l'idée farfelue qu'il avait eu de venir s'enterrer ici, en pleine banquise. Et Le Saux avait sans doute raison : « Le soleil ne se lève que pour celui qui va à sa rencontre ». Alors maintenant qu'il avait enfin croisé sa route, il comptait bien faire de son mieux pour ne plus laisser sa douce chaleur rassérénante lui filer entre les doigts à nouveau.
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